Peut-on rapprocher l’Un plotinien et l’Ereignis heideggérien?
Ils se rapprochent en ce sens que l’un et l’autre se situent au-delà de l’Être. Ils se distinguent car leur transcendance se déploie en direction de l’identité pour Plotin (transascendance) et dans le sens de la différence pour Heidegger (transdescendance).
L’Ereignis heideggérien n’est pas, comme l’Un plotinien, une unité excluant toute altérité, il est au contraire affirmation de sa différence d’avec l’Être qu’il «destine», lui-même «procuré» par le Temps. Alors que l’extase plotinienne vise l’union, la fusion avec l’Un, pour Heidegger, elle est avant tout ouverture, béance, par laquelle l’Être sort de lui-même, ek-siste. Si l’extase plotinienne est retour vers une source qui est rejet de toute altérité, retrait dans l’identité de l’Un sans l’Être, la pensée de Heidegger est maintien de la différence et de l’extériorité de l’Être qui se dévoile avec le Temps dans l’Événement, l’Ereignis.
Le «salut» alors n’est point dans la simplification, mais dans le consentement à la différence, il est une perte.