Une lecture est une ré-écriture mentale du livre, ré-écriture qui « fait »sens : cette tension entre une instance productive (ici l’auteur) et une instance interprétative (le lecteur) induit un déplacement du sens vers le lecteur.
Ce dernier va procéder à une reconstruction mentale de l’écrit selon une stratégie interprétative qui lui est propre mais surtout guidée par une présomption d’isotopie (il serait hors de propos de revenir ici sur cette notion introduite par Greimas et reprise par Rastier dans sa Sémantique Interprétative) et au final comment il passe des parties au tout, à savoir des fragments à l’unité texte. Il va de soi que cette présomption peut avoir des origines diverses : type d’ouvrage particulier, auteur connu, consensus social, etc. Ne perdons pas de vue non plus que les pratiques interprétatives se lient intimement au contexte au moment de la lecture. Le contexte est indissociable de toute activité d’interprétation. Feuilleter un ouvrage est une activité classique, presque trop. Qui se pose encore la question de savoir pourquoi on feuillète un livre et surtout comment le faire ? En y réfléchissant, le feuilletage n’est pas fondamentalement différent d’une lecture. Une lecture, certes, mais particulière et accompagnée d’un certain nombre de contraintes.
On peut d’ailleurs répertorier 4 types de lecture : le scanning, lecture réceptive continue (qui nécessite un effort de concentration), lecture réflexive (lecture dense qui nécessite des pauses) et la lecture rapide (savoir si quelque chose est intéressant au sein d’un texte). Le feuilletage s’apparente à une lecture rapide du fait des contraintes temporelles (peu de temps à disposition pour détailler le livre) et visuelles (une page tournée rapidement ne laisse entrevoir qu’une infime partie de sa topographie).
Dans ce cas, comment définir le feuilletage ?
C’est un ensemble d’opérations afin d’établir la lecture d’un livre dans des conditions spécifiques (contraintes de temps, linguistiques, etc.) et orientées vers une première (les théories herméneutiques tablent sur une refonte permanente du sens) esquisse globale mais schématique du livre ; une sorte de ré-écriture mais succincte et orientée vers un objectif particulier.