Dans la perspective classique telle qu’elle est mise au point à la Renaissance, tous les chemins parcourus par le regard conduisent vers un point exact et prédéfini.
En ce sens, l’esprit est dès la source totalement piégé et ne peut attendre de la suite qu’une errance dans l’attention, du premier plan à l’arrière plan - notre esprit ne formulant aucun choix véritable compte tenu de la programmation visuelle établie et mise au point par l’artiste.
Dans la démarche autonome et métabologique de Duchamp, le temps semble au contraire traverser la toile. Il se manifeste sans contraindre l’esprit à s’adapter à la vision d’origine de l’oeuvre. La peinture de Duchamp est d’emblée réflexive, le sujet n’est un objet mais le dépouillement même de tout objet : en définitive un nu qui tente de penser son propre mouvement. La mariée est donc dotée de quatre dimensions, alors que les célibataires n’en ont que trois : la femme flotte au-dessus de la suite, dans son propre monde. Indépendante. Et ceci sans aucun mouvement translationnel, sans modification locale apparente.