Le textel envoyé sur la timeline apparaît d’un coup d’un seul sur l’écran.
Il tombe là comme par chance, comme par hasard. Chaque envoi paraît comme un vrai fortune-telling tweet ! Mais à quoi correspond ce hasard ? Comment comprendre cette apparition soudaine, banalisée, induite dans le flux continu des listes accueillant le message et le dépassant aussitôt dans le Grand Oubli de la Mémoire totale des réseaux sociaux d’Internet ?
Le lecteur tombe dessus à la manière d’une chute qui vient de se produire. Dans les messageries, il y a toujours ce petit effet de surprise et de plaisir à la fois au moment où le message apparaît sur la page. Un peu à la façon d’une association très connue d’une partie de la science moderne par exemple, inaugurée par la fameuse pomme de Newton et sur laquelle la plupart des grandes découvertes scientifiques à l’ère moderne se sont faites …
C’est à la faveur de ce support à la fois volontairement exhibé et en même temps totalement crypté (l’intégralité du textel ne figure jamais dans la mention : il n’y a souvent que le titre et l’adresse internet écourtée permettant d’y accéder) qu’une certaine signification des choses se promet à nous. Mais avant d’en venir à la teneur du message et a fortiori du message lui-même, c’est la vérité du système de communication permettant l’envoi qui se révèle au lecteur : la vérité du textel comme crypté (le secret confiné dans l’envoi va s’ouvrir une fois le textel déchiffré), le cryptage apparaissant comme la vérité de l’envoi (la vérité pour l’instant dans la mention se présentant sur la timeline comme indéchiffrable dans son contenu total).
Faute ou excès d’adresse, l’envoi sur le réseau se prête ainsi à tomber sur tous les écrans, à apparaitre sur la page de toute la communauté adressée, il tombe finalement dans tous les dispositifs de lectures fixes ou mobiles imaginables. Même si ce que j’ai à dire à quelqu’un en particulier est tout à fait indéchiffrable pour tous les autres…Le textel mentionné réunit ici cryptage et déchiffrement, secret et vérité, en son support glacé, furtif et léger…
Le textel affiche la vérité de ce qu’il contient (en général ce que nous lisons sur le tweet correspond à ce qui est promis une fois que nous cliquons sur le lien) et, en même temps, il garde cette vérité dans une sorte d’oubli bientôt totalement avéré. Il reste ensuite comme le rappel incessant d’une reproduction possible du dilemme initial (j’ouvre ou je n’ouvre pas?) ; mais cette mention du textel bientôt passée dans la timeline ne pourrait subsister qu’à la condition de correspondre au moins à la bonne adresse, au bon cryptage (imaginez un peu si ce que je vous dis dans le textel est un message personnel entre vous et moi, un contenu que nous serions les seuls capables de déchiffrer…) . Il faudrait encore pour que le contenu soit totalement compris que l’adresse de l’envoi sur votre timeline soit retenue – ne serait-ce que pour venir vous demander plus tard, à vous, et à vous seuls, ce que finalement le message initialement personnel contenait.
Au final, la destination ou la détermination de la vérité du textel ne vient pas : il y a toujours un autre textel (ou tweet) pour remplacer l’autre, en avance sur le temps d’apparition du précédent, annulant le temps de lecture de chacun comme si le prochain en savait toujours davantage que celui dont on déchiffre maintenant le contenu. L’anticipation détourne alors le sens du message initial, qui à son tour et en son temps avait lui-même déjà gravé cette anticipation dans son écriture, et ainsi de suite…En toute logique, il n’y a donc pas de communication possible, il n’y a même pas la possibilité d’un seul envoi - car un textel dans son unicité ne pourrait pas exister de manière autonome. Il y a plutôt des communications ou des envois. Il n’y a même pas le pluriel comme vérité du textel (non pas une multiplicité de multiplicités mais des multiplicités de multiplicités). Le message est toujours déjà mis dans le « ainsi de suite » du textel à venir, celui que le précédent avait déjà promis.
Rejoignez le Journal de l'Hypertexte en anglais (posts du jour différents de ceux ici présents) -
Connectez-vous sur hypertextual.net l'Hypertexte Principal de la Solution -
Tous les eBooks accessibles sur Phonereader.GoogleBooks
Entrez dans la Bibliothèque pour readers mobiles de Phonereader.eu
Jean-Philippe Pastor
Bookmark this on Delicious
métabole
hypertexte